Le siège d'Uxellodunum d'après les textes antiques...
1 ECRITURE DES COMMENTAIRES SUR LA GUERRE DES GAULES
PAR CESAR : REMARQUES
César a écrit les sept premiers livres des "Commentaires sur la Guerre des Gaules" durant les mois d’octobre, novembre et décembre de l’an 52 avant Jésus-Christ, après sa victoire sur Vercingétorix et les Gaulois coalisés.
Il a rédigé les Commentaires rapidement, en utilisant ses propres notes et les rapports de ses lieutenants, pour justifier son action aux yeux des Romains qui murmuraient de plus en plus contre lui.
Dès le mois de janvier la résistance gauloise reprit. Elle se poursuivit au printemps et pendant l'été -51. César dut vaincre les insurrections des Ambiens, des Atrébates et des Bellovaques dans la région de Nointel et Clermont-de-l’Oise, celle des gens du Poitou et du pays de la Loire, celle des Cadurques, enfin, à Uxellodunum, dont le siège est le dernier fait majeur de la guerre des Gaules. Aucun autre affrontement de résistance gauloise ne nous a été transmis par des écrits ou la tradition.
Après un court séjour en Aquitaine, César hiverne dans la Gaule Belgique et parcourt les cités dans un but pacificateur. Il ne voulait pas donner prétexte à une nouvelle guerre au moment de sa sortie de charge(1). Hiver laborieux, sans le repos traditionnel, durant lequel César était moins libre pour rédiger la dernière année de campagne. Il avait surtout l’esprit ailleurs : comment réagir devant l'opposition grandissante à ses ambitions, opposition qui se développait en Italie et se cristallisait à Rome autour de Pompée ?
Dès les beaux jours, tout étant calme en Gaule, il rentre en Italie avec son armée et reçoit un accueil triomphal au-delà des Alpes. Pendant ce temps, ses ennemis confient des troupes à Pompée pour << défendre la République >>. La guerre civile est en train de se nouer : nous sommes dans l’été -50. César négligeant l'écriture, se consacre à la politique. Le Bellum Gallicum s’arrêtera donc à la fin du 7e livre.
Aulus Hirtius(2), l'un de ses proches qui l’avait suivi en Gaule (?)(3), poussé, semble-t-il, par d’autres familiers de César, décida de compléter l’ouvrage de César. A quel titre accompagnait-il l'imperator ? On ne sait rien de précis à ce sujet. Il n’est jamais nommé parmi les lieutenants dirigeant des opérations. Plusieurs auteurs suggèrent qu’il devait avoir une fonction de chef du Secrétariat de l'État-major ou officier d'intendance(4). Certains auteurs pensent qu'Hirtius n'était pas présent au cours de la dernière campagne de l'été -51, donc au siège d'Uxellodunum(5). Ainsi Constans écrit : "Hirtius n'a probablement pas vu Uxellodunum", Rice Holmes adopte la même position(6), Pierre Grimal écrit "Hirtius n'avait point participé à l'affaire d'Uxellodunum. Il en parle d'après les récits que lui firent les acteurs, dont César lui-même, et déjà se fait jour la possibilité d'un doute sur les détails qu'il donne"(7). Nous savons qu'ultérieurement, Hirtius accompagnera César pendant la guerre civile, en Espagne, en Grèce et en Orient. Préteur en -46, proprêteur en Gaule en -45, César le désigne en -44 comme consul pour l’année suivante. Après la mort du dictateur, il est révolté par les excès d’Antoine, se range dans le parti du Sénat et meurt devant Modène en avril -43.
En dépit des excuses figurant dans sa lettre préface, à Balbus(8), Hirtius a écrit le huitième livre avec la même rapidité, la même méthode et le même style que César(9), ce qui laisse supposer qu'Hirtius avait déjà participé aux écrits du conquérant ? Cette rapidité est prouvée par les conditions dans lesquelles Hirtius aurait rédigé ce huitième livre. Entre les ides de mars -44 et sa mort, avril -43, il disposa à peine de quelques semaines, car consul désigné, puis en exercice, il fut accaparé par la politique et les luttes civiles. D’autre part, il fut affecté par une maladie. La rédaction intervint entre le printemps et le milieu de l’été -44(10). Comme il l’affirme dans sa lettre préface, Hirtius s'est appliqué à décrire tous les événements depuis la fin du livre de César jusqu’à la mort du dictateur.
La préface écrite par Hirtius a pris la forme d'une lettre que l'auteur adressa à l'un de ses amis, Balbus, également ami de César. En réalité, c'est une fausse correspondance dans laquelle Hirtius, sous couvert de s'adresser à Balbus, s'adresse au lecteur. Il désigne le récent défunt sous le terme "Notre cher César". Cette tournure montre bien que lui-même et Balbus vivent sous le coup d'une profonde émotion causée par la perte de leur héros et ami. Cette préface est donc un hymne à César, non seulement César homme politique et militaire, mais aussi homme de lettres et histoire. Il semble qu'Hirtius ait accepté, sur l'insistance de Balbus, de raconter ce qui, dans des circonstances normales, eût dû incomber à César lui-même(11).
Le récit de la guerre d'Alexandrie fut achevée par un auteur inconnu, à partir des documents amassés par Hirtius et ses amis.
Il a rédigé les Commentaires rapidement, en utilisant ses propres notes et les rapports de ses lieutenants, pour justifier son action aux yeux des Romains qui murmuraient de plus en plus contre lui.
Dès le mois de janvier la résistance gauloise reprit. Elle se poursuivit au printemps et pendant l'été -51. César dut vaincre les insurrections des Ambiens, des Atrébates et des Bellovaques dans la région de Nointel et Clermont-de-l’Oise, celle des gens du Poitou et du pays de la Loire, celle des Cadurques, enfin, à Uxellodunum, dont le siège est le dernier fait majeur de la guerre des Gaules. Aucun autre affrontement de résistance gauloise ne nous a été transmis par des écrits ou la tradition.
Après un court séjour en Aquitaine, César hiverne dans la Gaule Belgique et parcourt les cités dans un but pacificateur. Il ne voulait pas donner prétexte à une nouvelle guerre au moment de sa sortie de charge(1). Hiver laborieux, sans le repos traditionnel, durant lequel César était moins libre pour rédiger la dernière année de campagne. Il avait surtout l’esprit ailleurs : comment réagir devant l'opposition grandissante à ses ambitions, opposition qui se développait en Italie et se cristallisait à Rome autour de Pompée ?
Dès les beaux jours, tout étant calme en Gaule, il rentre en Italie avec son armée et reçoit un accueil triomphal au-delà des Alpes. Pendant ce temps, ses ennemis confient des troupes à Pompée pour << défendre la République >>. La guerre civile est en train de se nouer : nous sommes dans l’été -50. César négligeant l'écriture, se consacre à la politique. Le Bellum Gallicum s’arrêtera donc à la fin du 7e livre.
Aulus Hirtius(2), l'un de ses proches qui l’avait suivi en Gaule (?)(3), poussé, semble-t-il, par d’autres familiers de César, décida de compléter l’ouvrage de César. A quel titre accompagnait-il l'imperator ? On ne sait rien de précis à ce sujet. Il n’est jamais nommé parmi les lieutenants dirigeant des opérations. Plusieurs auteurs suggèrent qu’il devait avoir une fonction de chef du Secrétariat de l'État-major ou officier d'intendance(4). Certains auteurs pensent qu'Hirtius n'était pas présent au cours de la dernière campagne de l'été -51, donc au siège d'Uxellodunum(5). Ainsi Constans écrit : "Hirtius n'a probablement pas vu Uxellodunum", Rice Holmes adopte la même position(6), Pierre Grimal écrit "Hirtius n'avait point participé à l'affaire d'Uxellodunum. Il en parle d'après les récits que lui firent les acteurs, dont César lui-même, et déjà se fait jour la possibilité d'un doute sur les détails qu'il donne"(7). Nous savons qu'ultérieurement, Hirtius accompagnera César pendant la guerre civile, en Espagne, en Grèce et en Orient. Préteur en -46, proprêteur en Gaule en -45, César le désigne en -44 comme consul pour l’année suivante. Après la mort du dictateur, il est révolté par les excès d’Antoine, se range dans le parti du Sénat et meurt devant Modène en avril -43.
En dépit des excuses figurant dans sa lettre préface, à Balbus(8), Hirtius a écrit le huitième livre avec la même rapidité, la même méthode et le même style que César(9), ce qui laisse supposer qu'Hirtius avait déjà participé aux écrits du conquérant ? Cette rapidité est prouvée par les conditions dans lesquelles Hirtius aurait rédigé ce huitième livre. Entre les ides de mars -44 et sa mort, avril -43, il disposa à peine de quelques semaines, car consul désigné, puis en exercice, il fut accaparé par la politique et les luttes civiles. D’autre part, il fut affecté par une maladie. La rédaction intervint entre le printemps et le milieu de l’été -44(10). Comme il l’affirme dans sa lettre préface, Hirtius s'est appliqué à décrire tous les événements depuis la fin du livre de César jusqu’à la mort du dictateur.
La préface écrite par Hirtius a pris la forme d'une lettre que l'auteur adressa à l'un de ses amis, Balbus, également ami de César. En réalité, c'est une fausse correspondance dans laquelle Hirtius, sous couvert de s'adresser à Balbus, s'adresse au lecteur. Il désigne le récent défunt sous le terme "Notre cher César". Cette tournure montre bien que lui-même et Balbus vivent sous le coup d'une profonde émotion causée par la perte de leur héros et ami. Cette préface est donc un hymne à César, non seulement César homme politique et militaire, mais aussi homme de lettres et histoire. Il semble qu'Hirtius ait accepté, sur l'insistance de Balbus, de raconter ce qui, dans des circonstances normales, eût dû incomber à César lui-même(11).
Le récit de la guerre d'Alexandrie fut achevée par un auteur inconnu, à partir des documents amassés par Hirtius et ses amis.
La déformation historique
Comme il a été dit plus haut, les Commentaires(12) sont avant tout un texte de propagande en faveur de César. Dans un tel contexte, l'élément primordial est l'appréciation que l'on peut porter sur la véracité du récit. Pour résoudre cette question, l’apport des historiens a été précieux, car ils ont catalogué des omissions et décelé des transpositions chronologiques. Toutefois, ceux mêmes qui ont dénoncé le mensonge de César n’ont jamais pu le convaincre d’insincérité totale. C’est que la matière historique de ses récits, la masse principale des faits relatés, étaient véridiques. En considérant que le mémorialiste a, pour rédiger, repris ses anciennes lettres, on pourrait, par une première approximation, admettre que tout ce qui est juste et vrai dans les Commentaires avait été matière de rapports et d’informations officielles. Cela ne signifierait pas que tout ce qu’annonçait un rapport était vrai. Des événements négatifs pouvaient être minimisés dans la forme, voire dans le fond. Au contraire des actions mineures pouvaient être mises en exergue. Telle est la méthode de celui, à toutes les époques, qui veut écrire l'histoire et non la relater.
Outre les falsifications proprement dites, décelables par la méthode historique, il faut reconnaître dans ces mémoires des convergences de procédés littéraires qui sont la preuve d'une tendance. L'exposé d'une suite d'événements s'y trouve doublé d'une suggestion constante, afin que le lecteur juge les faits et les personnages selon l'orientation que lui imprime le narrateur. Les mots, le pittoresque, l'agencement dramatique font sentir, sans mensonge apparent, la culpabilité d'un légat, l'indiscipline des troupes, la prudence et la sagesse de l'imperator. L'exactitude matérielle des Commentaires prouve donc l'habileté du grand homme, nullement son honnêteté. César montre une réalité, mais du côté qui convient à ses intérêts. Ainsi César connu pour ses capacités militaires, mérite également d'être distingué pour un autre aspect talentueux de sa personnalité, l'art de la déformation historique.
D’après Christian Goudineau(13), la Guerre de Gaules est une oeuvre « lisse», à la fois admirable et exaspérante pour l’historien et pour le lecteur d’aujourd’hui. Admirable s nou acceptons d’apprécier la parfaite adéquation des moyens au but poursuivi. Exaspérente si nous recherchons en elle ce qui ne s’y trouve pas ou à peine.
Préliminaire d'une résistance et repli des Gaulois sur Uxellodunum
Durant l'été 52 av. J.-C., le désastre d'Alésia avait laissé les Gaulois un moment désemparés. Ce répit avait permis à César de placer tranquillement ses légions en quartiers d'hiver sur divers points de la Gaule jugés par lui stratégiquement les plus importants. Mais les vaincus se ressaisirent vite. Les Gaulois attribuèrent leur défaite à une trop grosse concentration de troupes, dispositif qui les rendait vulnérables aux légions de César. Ils décidèrent donc d'attaquer désormais par petits groupes, sur plusieurs points à la fois, pour contraindre César à disperser ses forces (VIII, 1). César eut vent de ces complots. Il jugea cette tactique dangereuse pour lui. Il réagit immédiatement. La veille des calendes de janvier, il quitta Bibracte où il se trouvait en hivernage, avec une escorte de s'adjoignit deux légions et fonça sur le territoire Biturige dont la ville principale était Avaricum (= Bourges), (VIII, 2). L’arrivée soudaine de César surprit les Bituriges qui très tranquilles cultivaient leurs champs. La cavalerie tomba sur eux avant qu’ils pussent se réfugier dans les villes. Ils ne trouvèrent leur salut que dans la fuite ou la livraison d'otages. César s'en contenta. Son objectif était de soumettre les peuplades gauloises dans le rang (VIII, 2). César quintupla la solde des légionnaires pour les récompenser de la dureté de cette campagne hivernale. Son retour à Bibracte fut suivi par l’arrivée d'une ambassade de Bituriges venue l'appeler au secours : des Carnutes, peuple de la région de Cenabum (Orléans) venaient de leur déclarer la guerre. Saisissant cette occasion de montrer son amitié envers de si récents alliés, César prit deux légions cantonnées sur la Saône pour aller châtier les Carnutes (VIII, 4). Ce mouvement intervint sans doute au début du mois de février. L'approche des légions provoqua une débandade. Les troupes campèrent dans Cenabum abandonné. Sans abri, exposés au froid, les Carnutes durent se réfugier chez les peuplades voisines (VIII, 5). César, jugeant qu’il suffisait, au plus fort de la mauvaise saison, de disperser les groupes qui se formaient, afin de prévenir par ce moyen la naissance d’une guerre. Il laissa Caïus Trebonius avec deux légions hiverner à Cenabum, en prit deux autres pour réduire les Bellovaques (région de Beauvais) qui étaient en train de concentrer des troupes contre les Suessions (région de Soissons) et les Rèmes (région de Reims), amis des Romains. Il ordonna à Fabius d'amener ses deux légions chez les Suessions (VIII, 6). Arrivé chez les Bellovaques, César apprit que tous s'étaient rassemblés en un camp situé sur une colline entourée de marais, et qu'ils étaient décidés à le fixer en cet endroit s'il se présentait avec de trop gros effectifs, puis à attaquer, au moyen d'embuscades, les unités romaines de ravitaillement (VIII, 7). César essaya de faire croire qu'il arrivait avec peu de troupes ; il en laissa une partie en arrière, et disposa le reste en ordre de bataille. Les Gaulois refusèrent le combat. Il décida alors d'installer un camp fortifié avec double fossé, vallum et tours reliées entre elles par des passerelles (VIII, 8 et VIII, 10). Le temps passait et rien ne bougeait. Lancerait-on un assaut de face ? Il y aurait trop de pertes. Ferait-on un investissement en règle ? Les effectifs n'étaient pas suffisants. César appela alors Trebonius en renfort avec ses deux légions, et une autre commandée par Titus Sextius qui hivernait chez les Bituriges (VIII, 11). Au cours d'une embuscade tendue par les Bellovaques, le chef des Rèmes Vertiscos qui commandait la cavalerie(14) fut tué. Ce succès renforça le moral des Gaulois (VIII, 12). Après une minutieuse préparation, César réussit à franchir le marais qui séparait son camp des positions adverses (VIII, 13). Les Bellovaques prirent peur : ils mirent le feu à des broussailles qu'ils avaient amassées et, derrière l'écran de fumée, ils s'enfuirent pour gagner une autre position à dix milles de là (VIII, 14 à VIII, 16). |
Ils n'en continuèrent pas moins leurs embuscades. César apprit que l'une d'entre elles serait dirigée par le chef des Bellovaques Correos. Il avertit ses hommes, leur adjoignit des cavaliers, et lui-même suivit à peu de distance avec les légions, mais hors de vue pour ne pas donner l'éveil. Lorsque l'action fut engagée, il se présenta avec ses troupes fraîches et écrasa Correos, qui fut tué (VIII, 17 et VIII, 19). Apprenant le désastre, les Bellovaques demandèrent la paix et donnèrent des otages (VIII, 20 et VIII, 22). Leur autre chef, Commios, s'enfuit chez les Germains (VIII, 23). Le calme étant revenu, César décida de disperser ses légions pour tenir le pays par leur seule présence. Il envoya en particulier Fabius(15) avec 25 cohortes prêter main forte à Caninius, isolé dans l'ouest avec deux légions. Quant à lui, il partit ravager et saccager le pays d'Ambiorix pour l'affaiblir (VIII, 24 et VIII, 25). Caninius apprit alors que Duratios, ami des Romains, était assiégé dans Lemonum (= Poitiers) par Dumnacos, chef gaulois des Andes (pays de l’Anjou). Il se porta vers la ville, et s'installa prudemment dans un autre camp, sur une colline des environs. Dumnacos arrêta le siège, pour faire face à Caninius, et attaqua sans succès le camp romain. Déçu, il revint assiéger Lemonum (VIII, 26). A Fabius qui approchait, Caninius fit savoir comment se déroulaient les opérations chez les Pictons. Alors stationné en Touraine, Fabius accéléra pour se porter au secours de Duratios. Devant cette menace d'un troisième adversaire, Dumnacos se retira sur le champ et tenta de passer de l'autre côté de la Loire par l'unique pont qui la traversait(16). Fabius n'avait pas encore réalisé sa jonction avec Caninius, mais il devinait que l'ennemi allait essayer de se replier au-delà de la Loire. Il se dirigea donc vers le pont, surprit Dumnacos en marche. Lors d'une première attaque par la cavalerie romaine, les troupes gauloises subirent de lourdes pertes. La cavalerie romaine se replia jusqu'à son camp, puis renouvela son attaque le lendemain matin, occupant ainsi l'ennemi pour permettre aux fantassins d'arriver. Les Gaulois résistaient vaillamment. Mais la venue des légions provoqua une débâcle, suivie d'un massacre : 12.000 hommes furent tués et le convoi de bagages fut capturé (VIII, 27 à VIII, 29). Dumnacos réussit à s'enfuir vers la pointe de la Bretagne, tandis que Fabius recevait la soumission des Carnutes et des Armoricains (VIII, 31). A la suite de cette déroute, le Sénon Drappès qui avait rassemblé une troupe de 2 à 5000 hommes composé "de brigands", et le Cadurque Luctérios(17), échappé d'Alésia, décidèrent d’envahir la Provincia. Dans cette intention, (VIII, 30) ils se dirigèrent vers le sud, pour y porter la guérilla, le trouble et le brigandage. Alerté de ce mouvement et du danger, Caninius se lança à leur poursuite avec des forces trois à quatre fois supérieures. Talonnés par les Romains, et se jugeant incapables de résister à une telle supériorité numérique en rase campagne, les deux chefs renoncent à pénétrer dans la Province et décidèrent de se réfugier dans un oppidum. Ils se jettent, aux portes du Quercy, en pays cadurque, dans la place d’Uxellodunum. Luctérios étant des leurs, il rallie facilement à sa cause ses habitants. La capitulation d’Alésia, en 52 av. J.-C., entraîna la soumission de presque toutes les peuplades de la Gaule. Vercingétorix était prisonnier, mais la Gaule n’était toujours pas réduite à l’impuissance. Les vaincus se ressaisirent bien vite et décidèrent d’attaquer les Romains désormais par petits groupes et sur plusieurs points à la fois. César eut à combattre successivement les Bituriges (région du Berry), les Carnutes (région d’Orléans), les Bellovaques (région de Beauvais), les Trévires (Belgique) et enfin les Pictons, qui furent massacrés, dans la région de Lemonum (Poitiers). Plus de 12000 Gaulois furent tués. |
A la suite de cette déroute, le Sénon Drappès à la tête d’une troupe de « gens sans aveu » de 2 à 5000 hommes fut rejoint par le Cadurque Luctérios, rescapé d’Alésia. Ils décidèrent d’envahir la Provincia. Avec deux légions, le légat Caninius les poursuivit. Sur le point d’être rejoints, ils se réfugièrent sur l’oppidum d’Uxellodunum en pays cadurque (Quercy actuel).
Arrivé sur les lieux, Caninius établit trois camps sur les hauteurs et entreprit la construction d’un retranchement (contrevallation) pour entourer l’oppidum.
Drappès et Luctérios établirent un camp à 10 milles de la place d’Uxellodunum et s’y installèrent. Ainsi pouvaient-ils harceler les Romains et ratisser la région afin de recueillir le maximum de blé pour l’introduire dans la place. Ayant fait d’amples provisions, Luctérios qui dirigeait de nuit un convoi de blé vers la place fut intercepté par Caninius et mis en fuite. Suite aux informations fournies par les prisonniers, le camp de Drappès fut attaqué par surprise, son armée massacrée et lui-même fait prisonnier. Le plus surprenant dans cette histoire, c’est que les Gaulois ayant perdu leurs principaux chefs continuèrent un combat acharné. Ils tinrent tête à Caninius et à Fabius arrivé en renfort avec deux légions et demie. Caninius fut obliger de rendre compte à César qui arriva contre toute attente avec sa cavalerie suivie des deux légions de Calénus(18).
César voyant que la contrevallation entourait complètement la place, décida de priver d’eau les Gaulois. L’accès à la rivière fut interdit par des machines de guerre et devant la source qui jaillissait au pied des remparts, il fit construire un agger de 18 m de haut surmonté d’une tour de 10 étages (27 m de hauteur) pour empêcher les Gaulois de se ravitailler. Ces ouvrages étaient un leurre, une diversion, car César avait un autre plan : creuser des galeries souterraines, hors de la vue des défenseurs, pour assécher les sources. Malgré des combats violents et l’incendie de la tour, les sapeurs romains atteignirent leur but. Les Gaulois, privés d’eau se crurent abandonnés des dieux et se rendirent.
César fut impitoyable. A tous ceux qui avaient porté les armes, il fit couper les mains, mais laissa la vie sauve. Cette cruauté se voulait un exemple pour prévenir une nouvelle insurrection. La date fatidique du 1er mars 50 av. J.-C étant la fin de son proconsulat, il voulait rentrer à Rome victorieux. Un « ramassis de brigands » avait bien failli mettre en péril la suite de sa carrière politique. Ce combat en 51 av. J.-C. dura environ deux mois, de mi-juillet à mi-septembre.
La Gaule fut désormais soumise et devint province romaine, provisoirement rattachée à la Transalpine. Elle fut gouvernée par Décimus Brutus, Hirtius, Munatius Plancus.
Au début de l’année -51, la situation politique de César s’est considérablement dégradée. Julie, fille de César et femme de Pompée, est morte en mettant au monde un garçon qui n’a pas survécu. Le lien qui unissait César à Pompée est rompu. Puis, Crassus est mort à Carrhes, victime de la guerre qu’il menait contre les Parthes. Le pouvoir est repassé aux mains du Sénat qui joue à fond la carte de Pompée au fait de sa gloire, alors que celle de César est au plus bas. Les gaulois sont parfaitement au courant. En -55 sous le consulat de Pompée et Crassus, ses deux partenaires du premier triumvirat, son mandat de premier consul avait été renouvelé pour 5 ans. Il ne lui reste plus que l’été -50 à passer dans sa province, la Narbonnaise. A l’heure d’Uxellodunum la résistance gauloise n’était pas une entreprise désespérée, il fallait tenir.
La « guerre des Gaules » a fait des ravages(19) dont nous mesurons mal l’étendue : destructions et pillages systématiques partout où passaient les légions ; au moins 700 000 morts, autant de prisonniers - sinon davantage - vendus comme esclaves, soit une part importante de la population de certaines cités, surtout celle du nord et de l’ouest ; des richesses gigantesques avaient été englouties dans l’effort de guerre, en particulier la fabrication d’armes. Nombre de terres furent confisquées, attribuées à des « étrangers ».Ces huit années eurent donc pour conséquence un appauvrissement global qui ne fut surmonté qu’en deux ou trois générations. Mais d’autres facteurs allaient engendrer un dynamisme nouveau : l’installation d’Italiens, le désir d’intégration à l’empire des nouvelles élites, l’appel à l’urbanisation et à l’évergétisme, dont César puis l’empereur Auguste donnèrent l’exemple. Se mettait en place la parfaite mécanique de Romequi, par l’entremise des notables gaulois eux-mêmes, ferait de la Gaule l’un des fleurons de l’empire.
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